Les comportements des visiteurs, tels que le piétinement hors des sentiers balisés, le bruit excessif, et l’abandon de déchets, peuvent causer des dommages significatifs aux écosystèmes fragiles. Les données jouent un rôle essentiel dans la compréhension des comportements des visiteurs et la mise en place de programmes d’éducation à la nature et de sensibilisation au respect de la faune et de la flore. En collectant et en analysant des données précises, les gestionnaires peuvent adapter leurs stratégies en fonction des remontées du terrain.

Valider la pertinence des activités de sensibilisation écologique grâce aux données (Parc Miribel Jonage)

Depuis plus de 40 ans, la Segapal (Société publique locale de gestion des espaces publics du Rhône amont) gère le Grand Parc Miribel Jonage située entre le sud du Département de l’Ain et la Métropole lyonnaise. Ce parc de 2 200 hectares est à la fois un espace de loisirs et de détente, une réserve en eau potable pour 95% de la région lyonnaise et un site au patrimoine naturel exceptionnel : il est classé site Natura 2000, Espace Naturel et Sensible, et Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF).

La gestion et l’animation du site dans toute sa diversité d’objectifs est faite par la Segapal, dans le cadre d’une Délégation de Service Public. C’est dans ce cadre que la SEGAPAL a équipé le parc d’un réseau de compteurs permanents et mobiles pour accompagner les politiques du site. Les compteurs mesurent notamment la fréquentation du centre pédagogique dédié à l’environnement L’Iloz’.

Fréquentation du centre pédagogique dédié à l’environnement L’îloz’

Aménagé à l’est du parc en 2015, le centre pédagogique L’îloz’ est également suivi par un compteur PYRO qui donne les tendances de fréquentation. Un autre compteur DALLES est implanté sur la presqu’île du parc où ont régulièrement lieu des activités d’éducation à l’environnement.

La presqu’île est distante physiquement du parking d’environ 500 à 800m et séparée également des lieux de détente, ce qui fait qu’elle attire un public spécifique. Grâce à l’antériorité dans les données (site équipé d’un compteur DALLES depuis 2006), on peut mesurer cette fréquentation spécifique, relativement importante en mi-saison, périodes de l’année présentant des intérêts écologiques, mais plutôt stable en période estivale.

Dans l’optique d’étaler la fréquentation du site sur toute l’année, les données collectées permettent de valider la pertinence des activités de sensibilisation écologique (observation des oiseaux migrateurs, castors, etc.), qui attirent bien un public différent, et participent à réduire le pic de fréquentation estival et la pression humaine associée.

Education à la nature : centre pédagogique l'Iloz du Parc Miribel Jonage (crédit photo : LA HORDE DE / Christophe Millot)

Centre pédagogique l’Iloz du Parc Miribel Jonage (crédit photo : LA HORDE DE / Christophe Millot)

Mieux connaître les fréquentations pour éduquer différemment à la nature (Métropole du Grand Lyon)

Pour gérer et préserver ses Espaces Naturels Sensibles (ENS), la Métropole du Grand Lyon a fait appel au cabinet Euroêka Marketing Conseil pour la réalisation d’une enquête approfondie en 2016.

Une méthodologie de croisement de données quantitatives et qualitatives a été mise en œuvre pour y répondre.

L’enquête qualitative a été administrée sur 12 sentiers nature et 2 sentiers de randonnée par des enquêteurs. Un contrôle par rappels téléphoniques a été réalisé pour 10 % de l’ensemble des enquêtes. Au total, 1 001 questionnaires ont été administrés.

En parallèle, Eco-Compteur a installé 12 compteurs sur les mêmes sentiers nature (enquête quantitative).

En combinant les données quantitatives et qualitatives, la collectivité a pu faire évoluer ses actions de sensibilisation.

 

Évolution de la signalétique

Par exemple, la compréhension par la Métropole du profil des visiteurs a permis de réduire la signalétique et de la réadapter, en réduisant le nombre de panneaux informatifs, mais en y faisant figurer des informations mises à jour plus régulièrement, en lien avec l’information faisant ressortir des visites fréquentes des visiteurs (1,4 visites par semaine en moyenne).

Mise en place d’un jeu pour les familles

En analysant les fréquentations, les gestionnaires des espaces naturels ont également pu noter une sous-représentation des jeunes et des familles dans les visiteurs des sentiers. Un projet spécifique sous forme de jeu de piste (« La Vallée des 7 pierres sacrées » sur le sentier des galets voyageurs) a pu être développé pour faire découvrir les espaces naturels à une population qui en était alors éloignée. Sous forme de kits à acheter auprès des offices de Tourisme et autres points de vente dans le secteur concerné, les familles peuvent désormais découvrir les sentiers sur un mode ludique.

A titre d’exemple, les données ont permis de relever une augmentation de 40% de la fréquentation après l’ouverture du sentier « Jeux de regards ». Les données collectées permettent également de rationaliser l’impact d’une nouvelle ouverture de sentier sur la fréquentation, auprès des riverains notamment.

Jeu des 7 pierres sacrées (Crédit photo : Mairie de Craponne)

Jeu des 7 pierres sacrées (Crédit photo : Mairie de Craponne)

 

Suivre l’efficacité de la campagne d’information au programme de restauration des sols (Parc National Acadia)

Situé dans l’état du Maine, le parc national d’Acadia est très populaire aux Etats-Unis. S’étendant sur quasiment 20 000 hectares, il offre une variété de sentiers, montagnes et côtes toute l’année. Ses visiteurs nationaux et internationaux profitent de paysages grandioses.

Très fréquenté, le parc national d’Acadia est l’un des moins vastes des Etats-Unis, seulement 50e sur 63 par taille. Cela rend d’autant plus les enjeux d’éducation à l’environnement et de sensibilisation.

Deux sommets du parc (Mont Sargent et Penobscot Mountain) sont particulièrement fréquentés, et d’autant plus soumis au phénomène de piétinement et dégradation de la végétation.

En juin 2023, 72 bénévoles ont donc participé à un projet de restauration des « sentiers sociaux » très usés, sur les deux sommets en question, afin de revigorer la croissance de la flore.

Un climatologue du Schoodic Institute dépose un sac de terre au sommet du mont Sargent lors de la randonnée Save our Summits. (Photo : Sam Mallon/Friends of Acadia)

Un climatologue du Schoodic Institute dépose un sac de terre au sommet du mont Sargent lors de la randonnée Save our Summits. (Photo : Sam Mallon/Friends of Acadia)

Mais une fois le projet mené à bien, comment s’assurer que les parcelles restaurées restent intactes ?

Dans le cadre d’une étude menée en collaboration avec l’université du Maine, les Friends of Acadia ont également utilisé une combinaison de données terrain fournies par des compteurs permanents, avec des données d’enquête.

Cela leur a permis de connaître plusieurs éléments utiles :

  • Nombre de visiteurs et tendance à long terme
  • Fréquentation des parcelles concernées par le travail de restauration

Enfin : pour sensibiliser les visiteurs au travail de restauration des sentiers en cours, ils ont placé des codes QR sur des panneaux éducatifs dans les zones concernées.

En comparant le nombre de codes QR avec le nombre de visiteurs, ils ont pu connaître plus précisément le pourcentage de personnes s’étant intéressées aux panneaux descriptifs de l’initiative de préservation.

Conclusion

L’éducation à la nature et à la préservation de l’environnement s’appuie, comme toute pédagogie, sur la diffusion d’informations pertinentes, qui sont capable de toucher le public (aussi émotionnellement) pour concerner et sensibiliser.

Comme le montrent les exemples précédents, les données terrain peuvent jouer des rôles très différents, en amont pour la mesure de l’existant, comme en aval pour valider la pertinence des opérations menées (sensibilisation, restauration, etc).